Biais cognitifs : sommes-nous condamnés au conflit?

par | 21 avril 2020 | 30JoursPourYPenser | 0 commentaires

Notre cerveau est truffé de biais cognitifs. Très performant, il compte néanmoins des failles favorisant les conflits. Mais, peut-on réparer ces failles?

Temps de lecture : 23 minutes

Notre cerveau est truffé de biais cognitifs. Très performant, il compte néanmoins des failles favorisant les conflits. Mais, peut-on réparer ces failles? Bienvenu dans cet article qui pourrait à mal vos préjugés positifs sur l’humanité!

Les biais cognitifs en bref

Pléthore d’articles ayant déjà traité cette question, je ne rentrerais pas dans les détails. Pour faire simple néanmoins : de nombreuses théories et expérimentations ont été menées concernant des failles logiques de notre cerveau. Ce sont ces fameux biais cognitifs! On en dénombre environ 250, certains travaux confirmant expérimentalement ces biais ont mené à l’obtention d’un prix Nobel d’économie, tout de même1 ; l’article Wikipedia est une porte d’entrée si vous souhaitez en savoir plus.

Le but de ma recherche sur les biais cognitif peut se résumer comme suit : existent-ils des biais favorisant l’émergence de conflits? Quels sont ceux les plus évidents et directs sur la mécanique des conflits? Peut-on prévenir les conflits en comprenant mieux ces biais?

Structure du présent article

Afin de faciliter la lecture, le présent articles catégorise et décrit différents biais cognitifs en suivant la structure suivante :

  1. Catégorie d’appartenance du biais
  2. Biais, sa description et sa source
  3. Pourquoi cela peut faciliter les conflits

Les descriptions des biais sont le reflet du Codex des biais cognitifs 2016 et ne sont pas de mon fait. Mon apport est de déterminer l’influence possible en terme de conflits potentiels.

Mise en garde : attention au nihilisme

Les propos du présent article n’ont pas pour but de rendre sceptique face à la nature humaine, ou pire à forcer le nihilisme. Notre fonctionnement rationnel est en partie biaisé, c’est un fait. Et d’un point de vue évolutif, cela trouve ses raisons. Donc, je vous invite à ne pas voir le mal dans ce qui va suivre, à lire sans jugement de valeur.


Sélection de biais cognitifs facilitant les conflits

Nous portons plus de poids à une information qui confirme nos croyances.

Biais de confirmation

Le biais de confirmation, également dénommé biais de confirmation d’hypothèse, désigne le biais cognitif qui consiste à privilégier les informations confirmant ses idées préconçues ou ses hypothèses (sans considération pour la véracité de ces informations) et/ou à accorder moins de poids aux hypothèses jouant en défaveur de ses conceptions. En conséquence, les personnes sujettes à ce biais rassemblent des éléments ou se rappellent les informations mémorisées, de manière sélective, et les interprètent d’une manière biaisée. On dit aussi que les personnes « tirent la réalité » à elles.

Source : https://fr.wikipedia.org/wiki/Biais_de_confirmation

Nous ne sommes pas naturellement impartiaux.

Perception sélective

La perception sélective décrit comment nous classons et interprétons l’information sensorielle d’une façon qui favorise une catégorie ou une interprétation plutôt qu’une autre. En d’autres termes, la perception sélective est une forme de partialité parce que nous interprétons l’information d’une manière qui est conforme à nos valeurs et convictions.

Source : http://www.blog-psychologue.fr/article-la-perception-selective-69237414.html

Nous avons tendance à chercher la confirmation partout, à travers la crédibilité d’une profession, le charisme de quelqu’un, nos propres croyances pré-établies.

Validation subjective

La validation subjective consiste à valider une information – une phrase, un mot, une initiale ou un signe – parce que quelqu’un est capable de le trouver signifiant et significatif pour lui-même. La validation subjective est un élément essentiel de toute lecture froide réussie, qu’elle soit faite par un astrologue, un chiromancien, un cartomancien, un médium ou tout autre du genre. Le client dans une telle séance doit coopérer. Heureusement pour le médium, la plupart de leurs clients sont généralement désireux que le médium réussisse et sont prêts à travailler fort pour donner un sens personnel à tout ce que le médium leur dira. Dans une lecture froide réussie, le client sera convaincu que l’exactitude des données fournies n’est pas due à sa coopération mais au pouvoir de l’astrologie, de la chiromancie, du tarot, etc.

Source : http://www.sceptiques.qc.ca/dictionnaire/subjectivevalidation.html

Réflexe de Semmelweis

Le réflexe Semmelweis ou effet Semmelweis est une métaphore qui désigne la tendance à rejeter de nouvelles données ou de nouveaux savoirs car ils contredisent les normes, croyances ou paradigmes établis.

​Source : https://jcdurbant.wordpress.com/2011/08/23/vous-avez-dit-reflexe-de-semmelweis-rediscovering-a-flawed-pioneer-of-patient-safety/

Nous croyons que le monde est juste, qu’il y a des gentils à féliciter et des méchants à blâmer, et nous catégorisons les personnes sur la base de nos croyances.

Croyance en un monde juste

La croyance en un monde juste, ou hypothèse du monde juste, est un biais cognitif originellement décrit par le psychologue social Melvin J. Lerner (en), suivant laquelle on obtient ce qu’on mérite ou mérite ce qu’on obtient. Selon cette croyance, toute noble action d’une personne doit nécessairement et justement tendre à lui être bénéfique, tandis que toute action mauvaise tend à lui nuire. Autrement dit, l’hypothèse du monde juste est la tendance à considérer des événements produits ou attendus comme les conséquences d’une force universelle restaurant l’équilibre moral. Cette croyance implique généralement l’existence d’une force métaphysique : équilibre ou justice cosmique, destin, providence, etc. Elle peut aisément être la cause de sophismes, de rationalisation comme le blâme de la victime pour son propre malheur.

Source : https://fr.wikipedia.org/wiki/Croyance_en_un_monde_juste

​Catégorisation sociale

Le mécanisme de catégorisation sociale consiste à classer et donc à regrouper au sein de catégories, des individus ou des groupes en accentuant les ressemblances intra-catégorielles (biais d’assimilation) et les différences inter-catégorielles (biais de contraste). Ce mécanisme permet de simplifier la réalité sociale, de la structurer et donc de mieux la comprendre. Ainsi, selon Tajfel la catégorisation sociale se définit comme « un système d’orientation qui crée et définit la place particulière d’un individu dans la société ». Les stéréotypes sont à la base de la catégorisation car bien souvent les traits censés être caractéristiques d’une catégorie sont issus des stéréotypes qui sont véhiculés, à propos de cette catégorie.

Source : https://fr.wikipedia.org/wiki/Cat%C3%A9gorisation_sociale

Fixité fonctionnelle

La fixité fonctionnelle résulte du fait que les idées préconçues, que nous avons de l’usage ou de la fonction des choses, nous empêchent souvent d’utiliser ces dernières à d’autres fins. C’est, par exemple, le cas de la personne qui veut resserrer une vis mais qui, n’ayant pas de tournevis sous la main, ne pense pas à utiliser la pointe du couteau qui se trouve sur la table.

La question de la fixité fonctionnelle grâce à un exemple intéressant

Effet de compensation morale

La réalisation d’un acte individuel moralement valorisable peut donner lieu à la légitimation (généralement inconsciente) d’un acte moralement moins valorisable par la suite. Autrement dit, et tel que présenté par Monin et Miller [2001], une fois qu’un individu a démontré ses valeurs morales, vis-à-vis de lui-même ou de la société, il sera plus enclin à les enfreindre ultérieurement.

Source : un article très fournis au sujet de ce biais cognitif

Nous accordons une valeur excessive à ce que nous connaissons déjà, et vice versa.

Dévaluation réactive

La dévaluation réactive est un biais cognitif qui se produit lorsqu’une proposition est dévaluée si elle provient d’un antagoniste. Ce biais a été suggéré par Lee Ross et Constance Stillinger (1988). La dévaluation réactive pourrait être causée par une aversion à la perte, une polarisation d’attitude, ou un réalisme naïf.

Source : https://en.wikipedia.org/wiki/Reactive_devaluation


Effet de positivité

L’effet de positivité fait référence à la tendance, lorsque l’on évalue les causes des comportements d’une personne appréciée ou préférée, à attribuer aux dispositions inhérentes à la personne ses comportements positifs et à des causes situationnelles ses comportements négatifs.

Source : http://www.wikiwand.com/en/Positivity_effect

Notre perception de nous-même et d’autrui est biaisée (pire, nous croyons que non).

Illusion de transparence

L’illusion de la transparence est la tendance à surestimer le degré de connaissance qu’ont les autres de notre état mental. Une autre manifestation de l’illusion de la transparence (parfois appelée illusion de transparence de l’observateur) est une tendance à surestimer notre compréhension des états mentaux des autres personnes.

Source : https://en.wikipedia.org/wiki/Illusion_of_transparency

Illusion de connaissance asymétrique

Selon Pronin et al. (2001) le biais de l’illusion de la connaissance asymétrique consiste à être convaincu de sa propre perspicacité à deviner les autres tout en étant assuré de son opacité au regard d’autrui. Cette illusion de la connaissance d’autrui n’est pas sans conséquence dans les situations conflictuelles.

Source

Erreur de la motivation extrinsèque

L’erreur de la motivation extrinsèque est un biais attributif selon lequel les gens attribuent relativement plus de poids aux «motivations extrinsèques» (comme les récompenses monétaires) qu’aux « motivations intrinsèques » (comme l’apprentissage de nouvelles compétences) lorsqu’ils considèrent les motivations d’autrui plutôt que les leurs.

Source : https://en.wikipedia.org/wiki/Extrinsic_incentives_bias

Nous accordons plus de poids aux récompenses extérieures qu’à la motivation intérieure, ce qui nous dévie de nos aspirations profondes.

Biais d’attribution de traits

Le biais d’attribution de traits est la tendance à se considérer soi-même comme relativement changeant en termes de personnalité, de comportement et d’humeur tout en considérant les autres comme beaucoup plus prévisibles dans leurs traits de personnalité dans différentes situations. Plus spécifiquement, c’est une tendance à décrire son propre comportement en termes de facteurs situationnels tout en préférant décrire le comportement d’autrui en lui attribuant des dispositions fixes de personnalité.

Source : http://www.wikiwand.com/en/Trait_ascription_bias

Effet de troisième personne

L’hypothèse de l’effet de troisième personne prédit que les gens ont tendance à croire que les messages des médias de masse ont un effet plus important sur les autres que sur eux-mêmes, sur la base de biais personnels. En raison de cette perception, les gens ont tendance à prendre des mesures pour contrer l’influence de ces messages. L’effet de troisième personne se manifeste par la surestimation par un
individu de l’effet d’un message médiatique sur un « autre » généralisé, ou par une sous-estimation de l’effet du message sur lui-même.

Source : https://en.wikipedia.org/wiki/Third-person_effect

Nous nous croyons plus résistant aux influences que nous le sommes.

Biais de retenue

Le biais de retenue est la tendance des gens à surestimer leur capacité à contrôler un comportement impulsif. Une confiance exagérée en son propre self-contrôle peut conduire à une plus grande exposition à la tentation, et à une impulsivité accrue. Par conséquent, le biais de retenue a une incidence sur l’addiction. Par exemple, une personne pourrait expérimenter des drogues, simplement parce qu’elle se croit capable de résister à toute dépendance potentielle.​

Source : https://en.wikipedia.org/wiki/Restraint_bias

Biais de projection sociale

Projection sur (ou attribution à) autrui de nos propres croyances, opinions et visions de la réalité.

Source

Nous projetons un passé sur le présent, mais nos souvenirs sont imparfaits.

Biais des souvenirs en rose

Le biais des souvenirs en rose (rosy retrospection) fait référence à la découverte du fait que les individus évaluent plus positivement les événements bien après qu’ils se soient produits, qu’ils ne les ont évalués immédiatement après qu’ils se soient produits, comme une réminiscence de la phrase latine « memoria praeteritorum bonorum » (« souvenir du bon vieux temps »). L’effet semble être plus fort avec des événements modérément agréables, ce qui est généralement expliqué par le fait que les ennuis et déplaisirs mineurs s’effacent de la mémoire bien plus rapidement que les situations positives.

Source : http://www.wikiwand.com/en/Rosy_retrospection

Nous évaluons les choses à posteriori, oubliant alors partiellement le passé.

Biais du résultat

Tendance à évaluer des décisions d’après leur résultat – et non sur la base du processus décisionnel d’alors. Un biais cognitif également appelé biais des historiens.

Source

Le cerveau traite la majeur partie des informations nous parvenant de manière inconsciente; autrement dit, en arrière plan de la conscience2.

Effet de victime identifiable

Notre empathie se dirige naturellement vers ceux qui nous sont proches géographiquement, ethniquement, culturellement. Plus généralement, nous éprouvons plus d’empathie quand nous pouvons nous identifier à une victime ; et pour s’identifier à elle, qu’elle soit identifiable nous aide.

Source

Facilitateurs de conflits

Il apparait que tout ce qui distord notre perception de la réalité, tout en nous confortant dans l’idée que la réalité est ce que nous voyons, nous mène vers de potentiels conflits. Car ces biais œuvrent à travers l’esprit rationnel, nous poussant vers la discrimination, sur- ou sous-valorisation d’autrui, etc. Les stéréotypes raciaux et tout autre raccourci (tel l’idée selon laquelle untel a tel ou tel défaut ou qualité) sont, pour le meilleur et pour le pire, des résultantes de ces biais.

A lire aussi :  Rafraîchir sans climatisation : s'inspirer de la nature

Peut-on éviter ces biais cognitifs?

Les expérimentations ont démontré que…non. Tout simplement. Au niveau individuel! En revanche, au niveau collectif, il existe déjà des systèmes tendant à limiter les effets indésirables de ces biais; c’est le cas notamment des comités de lecture dans la recherche, ou de certains exercices d’intelligence collective comme les 6 chapeaux. Il semblerait que la recherche soit active dans ce domaine.

De la lecture du présent article, ressortent quelques points cruciaux:

  • Nous sommes à peu près tous biaisés d’une façon relativement similaire
  • Nous avons tendance à croire que nous ne le sommes pas mais que les autres le sont
  • Nous ne pouvons éviter ces biais cognitifs malgré la conscience que ces derniers existent

De manière générale, beaucoup des biais présentés ici peuvent mener à entretenir des prophéties auto-réalisatrices en figeant ou distordant notre vision du monde. Mais peut-on éviter d’en souffrir? Et si oui, comment?

Pistes pour atténuer les effets indésirables des biais cognitifs

Exprimer des sentiments, rester personnel

Je crois que les conflits existent entre autre parce que nous accordons une valeur disproportionnée à des pans de notre expérience que la science reconnaît aujourd’hui comme des biais, et que les mots et intentions ont une importance dans notre façon de communiquer les choses à autrui. J’en parlais dans un article précédent portant sur les relations humaines

Lire l’article « 4 astuces pour améliorer sa relation aux autres« 

En substance, j’y disais qu’à mon sens, raison et émotion peinent à se partager en même temps le devant de la conscience. Or, il apparait que les biais dont nous avons parlé semblent plutôt liés à la raison. Cela semble une bonne nouvelle : en exprimant ses sentiments, on peut communiquer sans pour autant projeter une perception erronée du monde sur autrui. « Je me sens frustré et déçu parce que j’ai besoin de considération » ne veut pas dire que l’antagoniste est responsable de quoi que ce soit. Autrement dit, une introspection à la recherche du sentiment, comme un indicateur de notre état actuel, pourrait tendre à réduire non l’effet du biais, mais plutôt la consistance que nous lui donnons.

Certes, le sentiment émergeant est amené par l’intellect, qui a lui-même subit la distorsion. Pour autant, son expression est ancrée dans le présent, et n’accorde pas un poids démesuré à l’extérieur. Quelle que soit la réalité qui a provoqué le sentiment, il est simplement ce qu’il est, et appelle un besoin à satisfaire, dans le présent.

Être objectif n’est possible qu’au présent

Quand on dit « tu es bordélique, tu es têtu, tu es généreux », nous ne pouvons l’affirmer que sur la base de croyances passées. De plus, si cela était objectif, n’importe quel humain de la terre pourrait dire la même chose. Or, les caractères que nous prêtons à chacun sont le résultat d’une cristallisation dans notre esprit d’un tas de fait objectifs que nous avons progressivement synthétisé en une croyance. Je le crois dur comme fer, personne ne nait avec des traits de caractère immuables; ces derniers ne sont que des croyances limitantes, des étiquettes de fausse réalité que nous collons sur les personnes, freinant de ce fait toute évolution non dirigée de la personne. Au contraire, à cause des biais précités, nous aurons tendance à attribuer à tel ou tel caractère l’action de l’autre, et à se conforter dans l’idée selon laquelle « mon fils est bordélique, y a rien à faire! ».

Donc, prenons le problème à l’envers et tâchons d’atteindre l’objectivité :

SubjectifObjectif
Le PSG est une équipe de loosers.Le PSG a perdu ses quatres derniers matchs.
Les décisions d’untel sont dangereuses pour l’avenir de notre belle ville.Je ne partage pas les décision d’untel et crois qu’elles sont dangereuses3.
On va jamais y arriver, on a jamais été d’accord là-dessus.Nous ne semblons pas d’accord là-dessus.
Tu es une personnes têtue.Je ne me souviens pas que nous ayons été ne serait-ce que quelques fois d’accord sur un sujet sans le débattre.
Quel bazar ici, la personne en charge du rangement n’est pas très organisée!Ici, je vois des objets sortis de leurs placards, de la vaisselle non lavée et j’ai du mal à m’y retrouver4.

On réagit souvent à ce type de phrases par un certain agacement et parfois la fameuse phrase « c’est trop compliqué ». Mais personnellement, si je vois une option en laquelle j’ai espoir d’un mieux avec des risques minimes, je prend. L’objectivité, si difficile soit-elle à atteindre parfois, ne peut froisser autrui5, elle est une voie hors des concepts humains, le lieu de la Rencontre possible entre humains.

Se créer des « phrases repères » (ou mantras)

Il est évident que si nous ne pouvons pas empêcher ces biais de distordre notre perception des choses, nous pouvons nous rassurer en se disant que connaître ces biais est déjà mieux que rien. C’est un pas vers cette célèbre sentence :

Tout ce que je sais, c’est que je ne sais rien.

Attribué à Socrate, écrit par Platon

Tout comme la méditation aide à cultiver certaines dispositions de l’esprit (calme mental, compassion, etc.), quelques phrases repères peuvent aider à garder à l’esprit cette imperfection qui nous caractérise, et cultiver l’indulgence. J’aime assez me dire que « tout le monde fait de son mieux », que « tout le monde rejette la souffrance et aspire au bonheur », que « être heureux est plus important que d’avoir raison ».

Les pensées et les mots ont du pouvoir sur notre réalité

Si vous objectez cette proposition des phrases-clés parce que vous la trouvez tirée par les cheveux ou « new age », sachez que nombres d’expériences ont démontré des processus de co-activation mnésique6 pour reprendre Michel Desmurget7. Vous savez, ces biais qui font que nous trouvons le vin meilleur quand il est plus cher8, que nous préférons le goût du Pepsi sauf quand l’étiquette Coca-Cola est apposée9, et que nos propres a priori sur des stéréotype raciaux peuvent modifier nos performances académiques10. On pourrait continuer très longtemps, mais cela tend simplement à prouver le pouvoir itératif des mots et des images. Ce qui se répète (ou que l’on répète) s’ancre en nous.

Pour conclure : sommes-nous condamnés au conflit à cause de nos cerveaux?

A la lumière de ce qui est décrit ici, on pourrait simplement arguer que oui. Pour nuancer les choses, disons que nous sommes condamnés à l’imperfection de la raison, mais que nous avons des lunettes pour voir ces phénomènes cachés. Quelques dispositions intérieures que nous avons décrites, je l’espère, pourra nous aider à garder en lumière ces biais cognitifs :

  • Exprimer des sentiments, rester personnel
  • Rester au présent pour atteindre l’objectivité
  • Se créer des « phrases repères » (ou mantras)
  • J’ajouterais ici « sonder nos intentions » (inutile d’éviter les biais si nous souhaitons manipuler les autres…)

Espérons que cela nous guide en direction de la Rencontre de l’autre, au delà des concepts biaisées avec lesquelles nous forgeons ce que nous appelons faussement réalité.

Que ce que j’écris ici puisse être un jour utile à d’autres, que cela arrête le juge prêt à juger, que cela sauve des malheureux, innocents ou coupables, de l’agonie à laquelle je suis condamné…

Le dernier jour d’un condamné, Victor Hugo

Bibliographie et ressources


A propos de la série #30JoursPourYPenser

Pendant le confinement lié au Coronavirus : 30 jours, 30 articles, autour de la nature et de l’humain, pour comprendre et dessiner un monde durable et joyeux !

Nous suivre

  1. en 2002, Daniel Kanheman []
  2. La biologie nous dit que les êtres vivants tentent de satisfaire leurs besoins en minimisant leur dépense énergétique. Ainsi, il est plus aisé de valoriser ce qui nous conforte rapidement dans des croyances pré-établies, de même que tout ce que nous avons déjà identifié auparavant est plus aisé à réitérer mentalement – ce qui nous fait tendre à réifier toute chose, par extension []
  3. exemple intéressant. Ici, on utilise toujours un adjectif, « dangereuses », mais en indiquant notre croyance personnelle. Autrement dit, on indique avec objectivité notre subjectivité. Dans le monde de la communication, tout le monde n’est pas d’accord sur ce sujet, certains déconseillent de procéder ainsi et invitent à se focaliser uniquement sur l’objectif. Je crois que parfois il est enrichissant pour une situation que les apports subjectifs soient faits, en toute transparence []
  4. pourquoi devrait-on en déduire que la personne en charge est désorganisée?! []
  5. il s’avère que malgré l’objectivité, certaines personnes réagissent avec colère, vexation à ce que l’on présente. Il est bien possible que si le sujet est touchant émotionnellement, l’interlocuteur voit une critique alors que vous avez décrit des faits. Restons vigilant à ces réactions pour pouvoir guider la personne vers le fait que nous avons été ou essayons d’être objectif []
  6. une sorte d’association s’opérant dans notre cerveau entre deux mots, concept, état d’esprit etc., à notre insu []
  7. La fabrique du crétin digital, éditions du Seuil, Septembre 2019, ISBN 978-2-02-142331-0 []
  8. Plassmann H. et al., « Marketing actions can modulate neural representations of experienced pleasantness, Proc Natl Acad Sci USA, 105, 2008 []
  9. Keinigs M. et al., « Prefrontal cortex damages abolishes brand-cued changes in cola preference », Soc Cogn Affect Neurosci, 3, 2008 []
  10. Shih M. et al., « Stereotype susceptibility » Psychol Sci, 10, 1999 []

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